Alison, Arras

Nous pratiquons l’Instruction En Famille (IEF) avec nos filles de 11 ans et 8 ans depuis 2016.

Après un parcours scolaire compliqué par la dyslexie, leur père a obtenu son bac et travaille depuis de nombreuses années comme responsable de collections dans une médiathèque. Titulaire d’un master II en Sciences de l’éducation, j’ai exercé comme professeure d’anglais plusieurs années, puis comme conseillère à l’emploi avant d’arrêter mon activité quand notre aînée avait un an.

Pourquoi avons-nous choisi l’instruction en famille ?
Notre cadette est entrée en maternelle à 3 ans. Elle était heureuse d’y aller, mais malgré une équipe éducative à l’écoute, elle a petit à petit développé une phobie scolaire. Elle pleurait quotidiennement, faisait des crises de panique et avait développé une maladie ORL. Nous avons alors décidé de la déscolariser. Quelques semaines plus tard, elle était guérie, à nouveau heureuse et épanouie. Remarquant un décalage avec les enfants de son âge, des bilans ont été réalisés quand elle avait 5 ans. Après un premier diagnostic de dysphasie et trouble de l’attention avec une hyperactivité modérée à 6 ans et demi, le diagnostic de trouble du spectre autistique (TSA) vient d’être posé à 8 ans. Ces spécificités expliquent certainement pourquoi elle était en souffrance à l’école. Elle ne souhaite pas y retourner pour le moment et la neuropédiatre ne l’en pense pas capable. Ce n’est cependant pas exclu à l’avenir, selon ses projets.
Notre aînée est entrée à l’école à 3 ans. En maternelle, nous avons du intervenir plusieurs fois auprès de l’équipe, qui parvenait à s’adapter à ses spécificités (elle avait par exemple peur de la récréation). L’entrée en CP a été plus compliquée: elle était si fatiguée qu’elle avait arrêté toutes ses activités périscolaires. En fin d’année, elle ne faisait qu’aller à l’école, faire ses devoirs, manger, se reposer. Elle a demandé à être déscolarisée comme sa sœur pour pouvoir reprendre ses activités et revoir ses amis. Elle envisage un retour au lycée pour mener à bien ses projets professionnels : devenir pâtissière ou travailler auprès d’animaux. Suite au diagnostic de TSA de sa sœur, la neuropédiatre a suggéré qu’elle fasse les bilans. Les premiers résultats arrivent et pointent vers le TSA (type Asperger), ce qui explique sa si grande fatigabilité à l’école et les difficultés rencontrées.

Comment se déroulent les apprentissages ?
Nous travaillons le matin de manière formelle. Nous avons choisi pour notre plus jeune des pédagogies adaptées pour enfants dys (Cléo, MHM) et des supports créés sur mesure. Nous utilisons beaucoup le storytelling et son intérêt pour le dessin.
Avec notre aînée, nous avons sélectionné des manuels classiques et des sites Internet comme Schoolmouv et Kartable qui s’appuient sur des vidéos, des quiz,… L’après-midi, les filles apprennent de manière autonome : elles ont des “coins” sciences, histoire, géographie qu’elles explorent à leur guise, avec notre aide si elles le souhaitent.
Elles ont également certaines activités hebdomadaires et d’autres ponctuelles en dehors du domicile. Nous souhaitons que leur instruction soit au maximum en lien avec le réel, qu’elles évoluent au quotidien au sein de notre société.

Qu’en est-il de la socialisation?
Nous sommes une famille insérée dans la société: leur père travaille dans une médiathèque qu’elles connaissent bien. Elles nous accompagnent dans les lieux culturels, scientifiques, touristiques mais aussi dans les commerces, les administrations dont nous leur expliquons le rôle. Elles viennent voter avec nous. Nous sommes impliqués au niveau associatif, auprès d’une association de soutien à la parentalité et d’une association autour de l’environnement et l’écologie notamment.
Nos filles ont par ailleurs leurs propres activités entre enfants: arts du cirque et équitation une fois par semaine. Notre aînée a fait de la musique plusieurs années. Elles participent aussi à des sorties ou à des ateliers plus ponctuels. Il s’agit parfois de groupes avec d’autres enfants en IEF: cycle d’ateliers au musée local, visites de station d’épuration, centre de tri des déchets, exploitation agricole,… Parfois de groupes d’enfants de tous horizons: à la maison de l’archéologie, au musée de l’environnement par exemple.
Plusieurs temps par semaine sont des temps de rencontre avec leurs amis pour simplement jouer et discuter. Notre aînée apprécie enfin d’aller au centre aéré de temps en temps.

Et les contrôles?
Tous les 2 ans, nous recevons l’adjointe aux affaires sociales de notre mairie. Les filles sont
toujours heureuses de la voir et de partager leur quotidien avec elle.
Tous les ans, l’inspecteur et sa conseillère pédagogique viennent également. Nos filles
effectuent des exercices scolaires. C’est un moment difficile à vivre pour elles, même si les
résultats ont toujours été satisfaisants. De notre côté, les relations sont bonnes, même si nous souhaiterions que le contrôle soit plus équilibré : il porte essentiellement sur les épaules de nos filles. Nous aimerions pouvoir présenter davantage nous-mêmes notre pédagogie et nos supports.

Le mot de la fin?
Nos filles ont pleuré quand elles ont entendu parler de la volonté d’Emmanuel Macron de rendre l’école obligatoire. “C’est comme si je m’étais pris une météorite en pleine tête” a dit notre plus grande. “Je ne veux pas retourner au collège, je ne veux pas être enfermée toute la journée, je ne pourrais pas”.
Nous souhaitons que leur intérêt supérieur et leurs besoins soient entendus, leurs droits respectés. Nous souhaitons que nos filles puissent continuer d’apprendre dans la joie, à leur rythme, autour de leurs centres d’intérêt autant que possible, via les nombreuses sorties que nous leur proposons, au contact des différents acteurs de la société.
Nous souhaitons enfin attirer l’attention sur les délais pour obtenir un diagnostic quand l’enfant est neuroatypique, qu’il soit TSA, TDA/H (Trouble de l’Attention avec ou sans Hyperactivité), dys (troubles dys tels que la dyslexie, la ysorthographie ou la dyspraxie),… L’enfant est déjà neuroatypique à 3 ans donc potentiellement en souffrance à l’école. Mais bien souvent, les premiers diagnostics ne sont posés qu’après 6 ans. Il n’est pas rare de voir des diagnostics posés jusque 8, 10, voire 11 ans comme mon aînée (notamment quand l’enfant est Haut Potentiel – HP – en parallèle). Le temps de la reconnaissance par la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) est également long, entre 4 et 7 mois voire plus selon les départements. Que d’années potentielles de souffrance si l’IEF n’est plus un choix possible ! Elle doit le rester, même sans diagnostic, même sans reconnaissance MDPH, pour tous les enfants.

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