Je m’appelle Céline. Avec mon mari Lionel, nous avons décidé de nous lancer dans l’Instruction En Famille (IEF) avec nos enfants Gabriel (11 ans) et Lilly (8ans). Il y a bientôt 2 ans maintenant.
C’est un des choix les plus importants de notre vie et le plus mûrement réfléchi.
Nos enfants sont restés dans le système scolaire plusieurs années mais l’idée de les instruire nous-mêmes m’a travaillée depuis l’entrée en maternelle de Gabriel. Et comme point de départ à cette réflexion, il y a eu ma propre scolarisation… chaotique !
En primaire et jusqu’à la fin des années lycée, j’ai subi du harcèlement scolaire.
Mes parents ont voulu me faire redoubler en 5ème avec 12,5 de moyenne. Les profs m’ont laissée passer en quatrième, année où j’ai finalement redoublé. Choix de l’orientation pour le lycée, je veux faire puéricultrice. Mon père ne le voit pas de cet œil. Je ne peux pas non plus suivre un cursus dans le professionnel. Il m’oblige à faire une filière générale (ES). Je double ma seconde et ma première. Viennent ensuite les problèmes personnels et mon envie de devenir éducatrice spécialisée pour aider les personnes handicapées ou les personnes atteintes d’obésité. Refus encore catégorique de mon père. Je me rabats sur des études pour travailler dans une crèche en maison rurale… Là encore mon père me bloque ! Je triple donc ma première, en changeant de filière (STT maintenant) et en changeant également de lycée. J’obtiens mon bac avec mes meilleurs résultats scolaires, avec l’aide d’une majorité de supers profs.
Je décide de me lancer dans un BTS assistance de gestion en alternance avec, à mon premier stage, une patronne qui me prend de haut, n’est jamais présente sur le site et ne comprend pas que je ne sache pas remplir mes fonctions (en même temps, on ne peut pas faire ce qu’on ne nous a pas appris dans une entreprise de constructions métalliques…). Elle me vire avec méchanceté et me rabaisse au passage bien comme il faut. Je change donc d’entreprise et de stage, avec un maître de stage me parlant (littéralement) en schtroumpf sur de la comptabilité américaine, qui ne veut pas me mettre à d’autres postes que celui qu’il a désigné (il me proposera même d’habiter chez lui et sa femme entre temps 😀 )
Vous m’excuserez de m’étaler sur mes « incompétences scolaires » mais cela fait partie de notre réflexion 🙂
Ce qui nous amène à la scolarité de nos enfants. Tout se passe plus ou moins bien. Etant accompagnatrice pour les sorties scolaires, je remarque plusieurs choses choquantes.
Les enfants, quand ils disent qu’ils font la bagarre, font VRAIMENT la bagarre, à gros coups de lattes dans le dos, devant les maîtresses qui ne disent absolument rien. Un groupe de garçons choisit un enfant et court jusqu’à un coin de la cour. Là, il tabasse celui qui a été désigné (je vous parle de ça, mon fils est en maternelle…). Les maîtresses n’agissent toujours pas, je fais donc la police à leur place.
Gaby rentre maintenant en CP. M’apercevant qu’il a quelques difficultés avec certains sons à la lecture, je demande un rendez-vous avec la maîtresse au mois de décembre. Je veux voir si elle remarque quelque chose de son côté. Elle me dit que non, tout va bien pour elle. Je devrai attendre le mois de juin, pour que la maîtresse me dise qu’il serait bon d’aller voir un orthophoniste (à une dizaine de jours des vacances scolaires quand même). J’apprendrai, par la suite, que cette maîtresse réclame le calme et la soumission des élèves à coups de règles sur la tête…
Enfin, la dernière année, celle où c’était devenu trop pour moi et où j’ai demandé à mes enfants s’ils étaient partants pour se faire instruire à la maison (je leur en avait déjà touché quelques mots avant mais le papa n’était pas encore convaincu donc je n’insistais pas) : le CE2 de Gabriel. Il faut savoir qu’il déteste l’école et les devoirs depuis le CP (on se demande pourquoi avec une maîtresse tortionnaire…) mais maintenant il se plaint de plus en plus de ses camarades. Plusieurs fois, il rentre à la maison en nous disant qu’il a encore été enfermé dans le cagibi (là où les jeux extérieurs sont rangés) par 4 ou 5 enfants de sa classe. Je lui demande de le signaler à la maîtresse et de ne pas se laisser faire. Au bout de la troisième fois, il me dit qu’il a été voir la maîtresse, qu’elle lui a dit de rester à côté d’elle, pendant que les autres jouaient, comme ça ils ne l’embêteraient plus… Double punition pour Gaby, qui voit ses « copains » le harceler et continuer à s’amuser, pendant que lui doit gentiment rester à côté de la maîtresse (les copains en question n’ont jamais été inquiétés d’ailleurs…).
Lilly, quant à elle, essaie tant bien que mal de se concentrer dans une classe où la majorité des enfants sont hyper turbulents. Elle n’y arrive pas, alors qu’elle a la volonté d’apprendre. Elle rentre en CP, avec cette même maîtresse tortionnaire, et je n’arrive pas à supporter l’idée que son parcours soit aussi semé d’embûches que celui de son frère.
Alors je fais tout pour convaincre Lionel. Je lis énormément, je me renseigne, regarde des documentaires. Je ne travaille plus depuis la première rentrée de Gaby à l’école (j’adorais mon boulot, mais je n’étais plus prête à faire des concessions pour manquer de voir mes enfants grandir, pour des patrons qui ne faisaient aucun effort pour rendre mon travail et mon dévouement considérés à leur juste valeur), la question de la perte d’un salaire n’est donc pas un obstacle non plus. Je ne suis pas bête, on ne m’a juste pas laissé ma chance et cette chance je veux pouvoir la donner à mes enfants. Il est pour moi INCONCEVABLE que mes enfants subissent le même parcours que moi. Mon fils est d’ailleurs le premier à sortir de l’école en hurlant « liberté aux enfants ! » Je n’en peux plus de voir les parents faire des clans devant l’école et nous regarder de travers, parce qu’on n’a décidé de ne pas en faire partie. Je n’en peux plus de demander la permission au directeur pour faire manquer l’école à mes enfants, quand il fait 38 degrés dehors et qu’il n’y a aucune clim à l’intérieur du bâtiment et qu’on me refuse cette absence et qu’on me mette en plus la pression et me réponde de travers, parce que quand même « il ne fait que 28 degrés dans les salles de classe, faut pas exagérer ! »… Je n’en peux plus de voir toute cette haine constante des enfants, cette haine des enseignants… Jusqu’au dernier jour des vacances scolaires, nous demandons à nos enfants s’ils sont sûrs et certains de suivre la voie que nous leur proposons. Nous ne voulons pas nous opposer à leur opinion. Nous voulons leur laisser le choix, même si pour nous, cela devient une torture de les renvoyer là-bas. Ils sont sûrs ! La rentrée se fera à la maison.
Certains membres de notre famille ne comprennent pas ce choix. Tant mieux, nous ne leur demandons pas de le comprendre. Encore aujourd’hui, nous avons droit aux réflexions sur la socialisation et aux « comment vous ferez quand ce sera les années collège ? Ils vont retourner à l’école hein ? Vous êtes sûrs de pouvoir suivre ? » Et d’autres nous félicitent, nous encouragent.
Une chose est sûre pour moi, le jour où on a annoncé aux enfants qu’il ne retourneraient pas à l’école (on leur laisse bien sûr toujours le choix d’y retourner s’ils le veulent vraiment), et je m’en souviendrai toute ma vie, j’ai vu le fardeau sur les épaules de Gabriel s’envoler ! Il s’est illuminé, a relevé les épaules ! Et c’est ce qui fait que c’est le meilleur choix que nous ayons fait pour nos enfants et nous en sommes tous les quatre convaincus. Bien entendu, l’entente n’est pas toujours au top mais les enfants sont moins en colère qu’avant. Bien entendu, c’est des fois laborieux de leur dire de travailler un peu mais il n’y a plus de bagarre pendant des heures pour faire les devoirs. Bien entendu, c’est fatigant parfois de devoir tout gérer… Mais pour rien au monde je ne reviendrais en arrière. Nous avons décidé de donner une chance à nos enfants, de les laisser vivre et apprendre à leur rythme. Et à travers eux, je me sens libérée de mes années scolaires désastreuses. J’ai un but, j’apprends avec eux et je ferai tout pour les laisser choisir. Nous leur avons donné naissance et nous les soutiendrons quoi qu’il arrive !